La motivación del Proyecto Ma.mi Lab

Por Carolina del Valle / Fundadora de Ma.mi. LAB
 

Maternité et Migration : Reconstruire Identité et Communauté

Le Début : Arrivée et Déstabilisation

Depuis mon arrivée en Belgique, les expériences liées à l'immigration et au deuil migratoire ont profondément marqué ma vie. Durant les presque deux années qu'il m'a fallu pour apprendre le français, j'ai non seulement vécu mon propre processus mais j'ai aussi écouté les histoires de personnes de diverses nationalités qui, comme moi, naviguaient dans ce chemin complexe d'intégration. J'ai appris ce qu'était le deuil migratoire et combien de deuils j'expérimentais simultanément : le deuil de la perte de statut professionnel et de la langue et ma culture furent parmi les plus grands.

Je n'avais qu'un document d'attestation d'arrivée délivré par la commune et j'ai passé plus d'un an sans être régularisée en raison de multiples complications bureaucratiques en Belgique et de la crise au Venezuela en 2017. Cette situation me déconcertait profondément, surtout compte tenu du fait que mon compagnon était belge. J'ai souvent ressenti la tentation de repartir, mais les tensions politiques de mon pays le rendaient impossible.

La Transformation de l'Identité

Ces expériences ont radicalement changé ma vie : ma perception culturelle et sociale, ma vision de moi-même et des autres, mon identité même fut ébranlée. Là, j'ai compris que l'identité n'est pas statique, qu'elle change avec le temps, et que nous avons de multiples identités, pas seulement une. Je suis passée d'une femme indépendante et entrepreneure, avec ma propre société de production de films, une totale indépendance financière et mon propre appartement, à une femme dépendante, incapable de parler la langue du pays. Mes accomplissements et connaissances sont devenus invisibles au milieu de ce nouveau début de vie, générant une frustration profonde.
La précarité légale intensifiait cette vulnérabilité. Je n'avais que l'annexe 19 que j'avais pu obtenir à mon arrivée, et toutes les démarches allaient prendre beaucoup de temps. Mon époux, bien qu'étant belge, devait aussi prouver sa solvabilité financière — qu'il n'avait pas — car comme moi,
il se réintégrait dans son pays après 20 ans passés dans le mien. Je n'ai jamais pensé que j'en arriverais à ressentir la peur de croiser la police chaque fois que je sortais, fruit de la méconnaissance de mes droits et de mon statut légal.
del desconocimiento sobre mis derechos y estatus legal.
L'impossibilité de travailler dans mon domaine professionnel m'a obligée à travailler comme baby-sitter pour continuer à envoyer de l'argent dans mon pays. Ma famille dépendait de nous alors et encore aujourd'hui, car la crise au Venezuela n'a laissé aucune autre option. Cette dépendance familiale s'ajoutait à ma nouvelle dépendance économique envers mon partenaire, créant des couches supplémentaires de vulnérabilité.

Ma vie antérieure tournait entièrement autour du travail et de la réussite professionnelle. Dans cette nouvelle réalité, je ne me reconnaissais pas. J'avais perdu mon centre, mes repères, mon sens du but. Je sentais que je devais recommencer mon parcours professionnel de zéro, mais je manquais de forces. J'avais 37 ans et souffrais de dépression sans en être consciente, ce qui compliquait encore ma capacité d'adaptation et de reconstruction personnelle.

 

Maternité en Contexte Migratoire

Devenir mère deux ans après mon arrivée en Belgique fut une décision complexe. J'approchais de la quarantaine et traversais la période la plus difficile de ma vie, avec le moins de stabilité. Mon époux, bien qu'étant belge mais ayant vécu presque 20 ans dans mon pays, se trouvait également en processus de réinsertion.

La maternité, étant une expérience transformatrice en soi, a rendu cette « intégration » encore plus difficile. Il m'a fallu presque deux ans pour atteindre un niveau correct de français et je n'avais toujours pas d'emploi stable, à l'exception du travail de baby-sitter et d'un bénévolat rémunéré dans une
association où j'ai commencé à travailler comme graphiste.

Durant cette période, j'ai dû reconstruire complètement mon estime de soi. Mon identité avait été ébranlée dans ses fondements et j'étais devenue économiquement dépendante de mon époux. Cela a intensifié mon sentiment de vulnérabilité, mais a en même temps renforcé celui d'interdépendance. J'avais besoin de surmonter la peur de parler et de commettre des erreurs dans une langue étrangère, tandis que le deuil migratoire m'empêchait souvent de voir les opportunités qui se présentaient. Tout était très accablant.

 

L'Éveil de la Conscience Collective

En tant que femme et mère migrante, j'ai vécu intensément la difficulté de materner dans un contexte de changement identitaire durant la migration. Cette expérience m'a motivée à chercher d'autres mères pour comprendre si leur processus était similaire au mien.

À travers les rencontres sur ce chemin, j'ai pu constater que chaque expérience migratoire est unique, mais qu'elle partage aussi des points fondamentaux communs. Ce processus implique beaucoup d'isolement : on ne peut compter ni sur la famille élargie ni sur les réseaux de soutien, et le manque de références culturelles s'intensifie avec la naissance d'un enfant. Tout devient psychologiquement accablant.

La charge mentale administrative de la migration, ajoutée à l'apprentissage de la langue, au processus d'insertion professionnelle, aux deuils professionnels ou à la perte de statut professionnel, plus les exigences de la maternité, ont rendu l'intégration extraordinairement complexe.

 

Reconnaître les Barrières Systémiques

Avec le temps, j'ai fini par identifier des éléments que je ne reconnaissais pas à l'époque comme de véritables barrières à l'insertion professionnelle : des discriminations multiples déjà plus systématiques, propres à la société d'accueil. Ce sont des aspects dont il est crucial de prendre conscience, car nous vivons dans une intersection de réalités où nous ne pouvons pas tout porter sur nos épaules.

Il existe diverses sources de discrimination liées à la maîtrise ou non de la langue, à l'accès ou non aux études supérieures, à l'accès à certains emplois limités par votre niveau de langue ou par la méfiance du milieu professionnel envers les étrangers en général. Je me suis demandé, consciente de mes certains privilèges en tant que membre d'une famille biculturelle, mais vivant en même temps l'énorme difficulté d'insertion professionnelle et de maternage : comment d'autres femmes-mères avec moins de ressources personnelles arrivent-elles à surmonter ces obstacles ? De cette question est né le premier rendez-vous de Ma.Mi.Lab en Belgique dont la promotion était centrée sur la question : comment réussir l'insertion professionnelle tout en maternant et en étant migrante en même temps ?

Vers la Construction Communautaire

À partir de ce processus de réflexion, j'ai commencé à développer de manière informelle un groupe de rencontres de femmes-mères latino-américaines. L'objectif initial était de pouvoir partager expériences et informations utiles dans notre langue maternelle.

Graduellement, ce projet a évolué grâce à l'implication d'autres mères bénévoles, jusqu'à devenir une association qui cherche à répondre aux défis spécifiques de la maternité en contexte migratoire à travers l'information fiable mais aussi la création de réseaux de soutien.

 

Réflexions sur la Migration et la Maternité

La migration implique fréquemment une rupture radicale avec le monde de référence habituel. Ces changements peuvent modifier profondément l'intégration sociale et professionnelle : les relations se transforment, les femmes peuvent vivre des périodes d'isolement qui s'aggravent selon leur durée. Nous expérimentons fréquemment une perte significative de capital social, tandis que la maternité reste un champ de revendications car il s'agit d'un travail sous-valorisé.

Pour beaucoup de ces femmes, leur plus grande valeur réside dans le fait d'être mères et, paradoxalement, elles ont tout quitté pour construire une famille ailleurs. Leur place dans ce « nouveau foyer » n'est pas toujours facile à trouver. Le Chemin vers l'Autonomisation, Trouver sa Place La question centrale qui émerge est : Comment revendiquer cet espace et valoriser les connaissances qu'elles possèdent déjà ? Comment reconstruire et récupérer cette place, ou mieux encore, comment la recréer ? À partir de l'espace de rencontre entre mamans en migration et des projets qui émergent, nous co-construisons vers l'autonomisation qui n'implique pas seulement pouvoir s'insérer professionnellement, ce qui est une partie essentielle de notre intégration, mais aussi pouvoir le faire en maternant. Je suis heureuse de le faire en sororité, car cela a trouvé une résonance profonde qui transcende les frontières individuelles et se transforme en force collective. Le fait d'avoir pu suivre diverses formations avec approche genre et de gestion/compréhension d'une approche interculturelle en Belgique, j'ai pu acquérir des outils que je mets en pratique pour l'élaboration de projets de manière collaborative avec la communauté à travers cette initiative.

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